Il suffit de lire la Une de L’Equipe ce matin et de tourner la page pour saisir toute l’ambivalence du personnage : « Dieu est mort », peut-on lire en couverture. Et en page une : « Une vie de tous les diables ».

En effet, pointe le quotidien sportif, « pour raconter une vie, et une mort, il suffit de revoir le visage de la grâce, un ange aux boucles brunes, béni par tous les dieux et par trop de diables […] et de regarder sans s’en détourner le masque devenu cireux, au crépuscule d’une vie traversée par la magie d’un pied gauche et les excès qui auront abîmé son corps tout entier. À 60 ans, Diego Maradona est entré dans l’éternité bien avant l’heure, mais d’un pas lent, essoufflé par la vie et par toutes les nuits qu’il ne voulait jamais quitter avant l’aube. »

« La disparition de Diego Maradona révèle que les surenchères funèbres ne sont pas réservées qu’aux divinités imaginées par les hommes pour conjurer l’effroi de la mort, pointent Les Dernières Nouvelles d’Alsace. Hier, la planète Covid s’est arrêtée de tourner un instant pour accueillir la nouvelle du décès d’un de ces dieux du stade qui désinhibent les passions et purgent les peuples depuis la nuit des temps. »

Génial et cabochard

Et Sud-Ouest le compare aux plus grands : « Il était au football ce qu’Elvis Presley était au rock’n’roll, ce que Michael Jackson était à la pop music ou ce que Gérard Depardieu est au cinéma. Lâché par son cœur que d’innombrables frasques n’avaient pas ménagé, Diego Maradona devait certes sa célébrité à ce ballon rond dont il faisait ce qu’il voulait grâce à un pied magique. Mais son nom était connu dans le monde entier, y compris de ceux qui n’éprouvent aucune chair de poule en entendant chanter un stade. Maradona aurait déjà dû mourir une dizaine de fois, s’exclame encore Sud-Ouest, victime de ses excès de fêtes, d’alcool, de cocaïne et de médicaments. Il avait invoqué "la main de Dieu" pour justifier ce but de la victoire, marqué au Mondial 86 contre l’Angleterre. Le but le plus ahurissant et le plus scandaleux de l’histoire du football mais qui avait serti un nouveau diamant dans la légende de ce gamin génial et cabochard. À force de défier la mort, Maradona a fini par lui céder et la main de Dieu n’a cette fois rien pu faire pour le mettre à l’abri. »

Tel une rock star…

« Céleste », s’exclame pour sa part Libération en Une. Avec cette photo pleine page d’un Maradona de dos, revêtu justement du maillot argentin ciel et blanc, le fameux albiceleste, arborant fièrement son numéro 10. « Véritable virtuose du ballon rond, Diego Maradona pouvait dans ses meilleures performances nous faire douter des lois de la physique, s’exclame Libération, autrement dit de notre propre mort. Ses dribbles, ses feintes et ses slaloms terrifiaient les joueurs adverses, poussant des scientifiques à émettre sérieusement l’idée que son centre de gravité était plus bas que la normale (…). Son deuxième but lors de la victoire de l’Argentine sur l’Angleterre durant la Coupe du monde de 1986 est probablement le plus beau dans l’histoire du football. »

« C’était une rock star absolue », renchérit l’écrivain Olivier Guez dans Le Parisien. « Sauf qu’au lieu d’avoir une guitare, il avait un ballon », affirme le Prix Renaudot 2017. « Maradona, c’est un mélange de Keith Richards, du meilleur acrobate de cirque et de Pelé. Il est unique en son genre. »

La légende continuera de courir…

Au final, constate Le Figaro, « misère, blessures, drogue, scandales, excès, Diego Maradona, considéré comme l’un des plus grands joueurs de l’histoire, s’est toujours relevé de tout. Au prix de nombreuses cures de désintoxication à Cuba ou en Suisse quand son corps de "Bibendum" menaçait de céder. Mais même au plus fort de la déchéance, jamais le lien n’a été rompu avec cette star, à qui tout a été pardonné, et ses inconditionnels. Naples n’a rien oublié des années fastes. Son portrait habille toujours certains murs. La légende de l’enfant des bidonvilles devenu roi du football continuera de courir dans les rues de Buenos Aires. Et d’ailleurs… »