Hommages et photos fleurissent ce matin. Avec un grand titre, sobre, que l’on retrouve dans Ouest France, en passant par Sud-Ouest, l’Ardennais, Le Progrès, ou encore Nord Éclair : « Valéry Giscard d’Estaing est mort ».

« Au revoir », lancent La Charente Libre, La Voix du Nord ou encore Corse Matin, référence au fameux « au revoir » de Giscard lors de son allocution télévisée au lendemain de sa défaite à l’élection présidentielle de 1981.

Pour Le Dauphiné, c’est « le dernier au revoir ».

« Valéry Giscard d’Estaing, la mort d’un surdoué », titre pour sa part Le Figaro : « Souvent mal aimé ou mal compris, toujours classé en queue de peloton des présidents de la Ve République dans les études d’opinion, il aura été un grand réformateur auquel l’histoire rendra justice. Centriste, libéral, européen, il était d’abord un surdoué de la politique. »
Une défaite jamais digérée
Le Figaro qui retrace par le menu le parcours de VGE : bachelier à 15 ans, puis Polytechnique, l’ENA, député à 34 ans, secrétaire d’État à 37 ans, ministre des Finances du général de Gaulle à 40 ans et président de la République à 48 ans, après la mort de Georges Pompidou. Puis battu à la présidentielle en 1981 face à François Mitterrand. « Combien de temps aura-t-il fallu à Valéry Giscard d’Estaing pour se remettre de sa défaite ? », s’interroge Le Figaro. « En réalité, à l’entendre dire que la France avait commencé à aller mal en 1981, à observer son regard quand il évoquait ce 10 mai politiquement fatal, à lire les trois tomes de ses Mémoires, la réalité était clairement qu’il ne l’avait jamais vraiment digérée. »
VGE : l’incompris…
Le Parisien le qualifie de « président incompris » : « Il voulait faire de la France une "société libérale avancée" et gouverner au centre droit en rassemblant "deux français sur trois". Giscard veut dépoussiérer la fonction, pointe le journal. Il arrive à pied à l’Élysée, réorchestre La Marseillaise (…). Il sera l’artisan d’une modernisation du pays dont il ne sera jamais crédité. Il engage de nombreuses réformes sociétales comme le droit de vote et la majorité à 18 ans, le divorce par consentement mutuel, ou encore l’IVG. (…) Il fera faire à l’Europe un pas décisif en créant le système monétaire européen, ancêtre de l’euro. Au regard de ses successeurs, son bilan ne manque pas d’allure, conclut Le Parisien. L’Histoire n’a pas encore rendu justice à ce président incompris. »

Justement, « Giscard et les Français, la grande incompréhension », lance Libération : « Le Giscard modernisateur qui a séduit les Français n’aura pas tenu la distance de son propre septennat, relégué par le Giscard conservateur, le vrai, plus sincère en tout cas. Le problème, c’est que ce Giscard-là, pétri de certitudes économiques libérales, a été englouti par la vague du chômage de masse consécutive au premier choc pétrolier. (…) Giscard se sera plaint toute sa vie d’avoir été incompris des Français. Fatale erreur, s’exclame Libération, sans doute liée à cette arrogance si fortement ancrée en lui. En fait, c’est Giscard obnubilé par l’écriture de sa propre histoire, qui n’a pas compris les Français. »
Deux versants
« Un destin, deux versants », remarquent Les Dernières Nouvelles d’Alsace : VGE « a été le produit d’une France élitiste et d’héritage. Et en même temps, avant que ces mots ne soient à la mode, d’une modernité à donner le tournis au pays. Jugé parfois suffisant, il a aussi été populaire. Opposé aux dérives d’une "monarchie républicaine", il se complaisait dans les ors des palais dévolus au pouvoir. Tour à tour cible de ses alliés et allié de ses anciens adversaires, VGE était un homme cherchant le progrès. Il a légalisé l’avortement et y a perdu une part du vote catholique. Il a accordé la majorité et le droit de vote à une jeunesse qui favorisera la victoire de François Mitterrand. Il a donné de la visibilité à un Chirac qui, froissé dans son orgueil par tant de condescendance centriste, s’en ira vers son propre destin de personnage d’État. (…) Les deux versants de VGE, concluent Les DNA, l’ancien et le moderne, une fascination des sommets et une attention au quotidien le plus modeste, dans la cordialité ou parfois dans la rancœur, avaient un point de jonction : l’État, qu’il a servi avec style. Dans une Europe qu’il a rêvée. »