« Macron au charbon », lance Libération en première page. « Pas de temps à perdre. (…) Si le chef de l’État est sorti en tête dimanche avec 27,8%, sa réélection est loin d’être acquise. La candidate d’extrême droite Marine Le Pen bénéficie potentiellement de davantage de réserves automatiques de voix qu’Emmanuel Macron (…). À défaut d’aller chercher ces électeurs de gauche avec les dents en opérant un virage programmatique à 180 degrés, il s’est agi pour la macronie hier, lors d’un déplacement dans les Hauts-de-France, terre ouvrière évidemment pas choisie par hasard, de multiplier des "signes" (en direction des 22% d’électeurs de Jean-Luc Mélenchon). Avec des mots-clés comme : "jeunes", "social", "écologie", "droits des femmes"… Mais la pente de cette opération séduction est raide, pointe encore Libération. Malgré les appels à voter Emmanuel Macron qui se multiplient à gauche, les stratèges de la campagne du chef de l’État savent qu’insister sur les mesures déjà prises ou l’envoi de quelques "signes" nouveaux ne suffira pas à convaincre les plus réticents à remettre comme il y a cinq ans un bulletin Emmanuel Macron dans l’urne, ou ceux qui seraient tentés de se réfugier dans une abstention qui profiterait à la candidate d’extrême droite. »
Convaincre…
« En déplacement hier dans le Nord et aujourd’hui en Alsace, Emmanuel Macron est enfin entré en campagne. Il était plus que temps », s’exclament Les Dernières Nouvelles d’Alsace. Et « s’il veut repousser les assauts de son adversaire le 24 avril, il ne peut pas se contenter d’appliquer la même recette qu’en 2017. Il ne peut plus être cru sur parole, alors il va devoir donner des gages, s’engager. Convaincre qu’il a compris le désespoir des Français, qu’il a entendu les colères, bref qu’il a sincèrement changé. Parce qu’une chose est sûre, conclut le quotidien alsacien, Marine Le Pen, elle, n’a pas changé. »
Responsabilité historique
Le quotidien Le Monde marque clairement son camp : « l’élection de Marine Le Pen à la présidence de la République constituerait une agression contre l’État de droit, une régression de la prise en compte de la catastrophe climatique, une révision de nos alliances extérieures au pire moment, alors que l’atroce guerre imposée par Vladimir Poutine à l’Ukraine achève de dévoiler la vraie nature d’un régime avec lequel la candidate a été si complaisante. En bonne logique, poursuit Le Monde, la seule manière efficace d’œuvrer pour sa défaite est d’appeler à voter pour Emmanuel Macron. Cela place le président sortant face à une responsabilité historique : réussir en quinze jours à endiguer un péril que le quinquennat qui s’achève a été – de son propre aveu – impuissant à faire refluer. »
Restaurer l’exercice démocratique
Pour Le Figaro, même si Macron gagne, il lui faudra reconstruire sur un champ de ruine… « Si les sondages disent vrai, la victoire d’Emmanuel Macron fait peu de doute, relève le quotidien de droite. Mais le paysage politique dévasté dans lequel il pourrait entamer son second mandat est très préoccupant. La frustration née du sentiment de l’alternance impossible risque de durcir un peu plus la tension qui traverse notre pays. La tentation sera grande, dans cette partition sociologique, de réveiller, comme le disait Tocqueville, "la guerre de classe à classe, de ceux qui n’ont rien contre ceux qui ont". Le chef de l’État l’a compris, qui promet de nouvelles formes de gouvernement. En vérité, c’est tout l’exercice démocratique qu’il faudra, d’urgence, restaurer. »
Gare aux « monstres démagogiques » !
En effet, complète La Charente Libre, notre « système politique à bout de souffle approche élection après élection du gouffre démocratique. La France politique est communautarisée façon Paris et le désert français. Comme un symbole de l’éloignement entre les citoyens et les décisions qui les concernent. Comme le symbole d’un ancien monde qui s’en va (celui des partis incapables de se renouveler, de travailler, d’apprendre des erreurs passées) face à un nouveau monde en train de s’imposer (celui des trois blocs culturels arrivés en tête dimanche). Entre ces deux mondes appelés à se succéder, prévient La Charente Libre, c’est le moment où surgissent les failles historiques, les tourments politiques, les monstres démagogiques. Nous y sommes. »

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