Scènes d’horreur dans la banlieue de Kiev. Après le retrait des forces russes, les soldats ukrainiens et les journalistes internationaux ont découvert des centaines de corps de civils… L’envoyée spéciale du Figaro raconte : « le long du bitume, sur des dizaines de mètres, se dessine un effroyable tableau. Des cadavres, des voitures brûlées - toutes allaient dans le même sens -, des corps carbonisés pourrissent sous un ciel gris. Des dizaines de civils fuyaient : les combats ? Les chars russes ? Les soldats ennemis ? En tout cas, ils fuyaient. Un homme noirci par le feu s’est écroulé sur l’asphalte, les jambes encore dans l’habitacle. (…) Un autre a échappé à l’enfer des mortiers. (…) Il a été abattu par-derrière. Ses yeux ont été dévorés par les rapaces qui survolent les villages. Autour de son poignet droit est noué un tissu blanc. Le portait-il pour indiquer qu’il était un civil ? Ou bien avait-il les poignets attachés ? Plus loin, dans le village de Boutcha, des habitants ont été abattus alors qu’ils avaient les mains liées. »
Une boucherie...
Ces images « nous rappellent avec force que la guerre n’est pas une affaire de stratégie militaire, ou de considérations géopolitiques, soupire La Croix. La guerre, ce sont d’abord des habitants terrorisés, des enfants qui pleurent, des corps mutilés, des cadavres qui pourrissent sur place, et des jeunes soldats transformés en monstres. Comme le disait Henri Barbusse, ce serait un crime que de montrer les beaux côtés de la guerre. Il n’existe pas de guerre propre. »

« Ce n’est plus une guerre, c’est une boucherie, renchérit Libération. Hommes exécutés les mains dans le dos, femmes violées puis brûlées, corps écrasés par des chars… La liste est longue des exactions que les Russes semblent avoir commises. Bien sûr, il faut rester prudent, pointe le journal. Depuis l’affaire des vrais-faux charniers de la ville roumaine de Timisoara, en 1989, on sait qu’il faut se méfier de l’émotion et des images prises à chaud. Un travail d’enquête permettra de déterminer la nature exacte des crimes russes perpétrés en Ukraine. »

En tout cas, estime encore Libération, « Vladimir Poutine porte une responsabilité écrasante dans cette situation, lui qui a chauffé, manipulé puis lâché ses hommes sur l’Ukraine mais aussi tous ceux qui, autour de lui, savent l’ampleur de la désinformation et gardent le silence par peur des représailles. Il faut que ceux-ci sachent qu’ils en paieront le prix un jour. »
Arrêter Poutine !
Le Parisien hausse le ton : « l’urgence est désormais, insiste-t-on de Berlin à Washington, de Rome à Paris, de "documenter" ces crimes pour amener un jour, peut-être, le président russe devant un tribunal. » Mais, « n’est-il pas plus urgent encore, s’interroge le journal, d’arrêter Poutine, en s’en donnant les moyens ? L’Europe parle de nouvelles sanctions, mais toujours pas de couper net les importations de gaz. L’Otan assure que ces "actes horribles" doivent "s’arrêter", mais sans dire comment. Alors que les responsables politiques et militaires alertent sur un simple repli tactique de l’armée russe pour mieux relancer des actions plus violentes à l’est de l’Ukraine, que le président Zelensky crie à l’aide face à un "génocide", l’Occident peut-il vraiment s’en tenir aux sanctions et à l’aide militaire à la résistance ? »
« Cela suffit ! »
Un coup de gueule relayé et amplifié par dans une tribune du quotidien Le Monde, une tribune signée Jan Krauze, ancien correspondant du journal à Moscou, Vienne et Washington.

Jan Krauze qui fustige le choix des Occidentaux de limiter leur aide à l’Ukraine à des armes défensives et qui s’interroge sur leur attitude vis-à-vis du dirigeant russe. « Pourquoi a-t-on si peur de Poutine, au lieu de lui faire un peu peur, à cet homme qui ne respecte rien d’autre que les rapports de force (…) ? L’arme nucléaire ? S’il veut l’utiliser (ce qui est extraordinairement improbable), il le fera, en inventant la justification nécessaire, et quelques avions et quelques chars n’y changeront rien. (…) Veut-on vraiment continuer à trembler devant un despote qui assassine ses opposants, ment comme un arracheur de dents et massacre des civils ? », s’interroge encore Jan Krauze. « Ou (bien) faut-il, fût-ce par Ukrainiens interposés, lui dire, beaucoup plus clairement : cela suffit. Livrer des armes dites offensives, contrairement aux apparences, n’augmenterait pas le risque, conclut-il, mais, à terme, le diminuerait. »

Et en effet, enchaîne Ouest-France, « en état évident de légitime défense, les Ukrainiens demandent des armes. À nous de les soutenir et d’augmenter fortement la pression sur la Russie. Pour tous les Européens qui n’ont, par bonheur, connu que la paix, la question de la légitimité d’une guerre se pose de manière pressante et inédite. Mais la neutralité dans cette affaire ressemble beaucoup à une lâcheté. »