Dans un monde parfait, les dĂ©cideurs lisent la synthĂšse du rapport du GIEC, font les arbitrages qui s’imposent et le climat se calme. Mais visiblement, ce n’est pas le scĂ©nario du film dans lequel nous avons tous un rĂŽle. Non seulement les dĂ©cideurs ne lisent pas, mais mĂȘme avec l’accompagnement acharnĂ© des passeurs qui font l’effort de rendre la prose scientifique intelligible, tout cela manque de concret. Car la science du climat a un problĂšme de taille : l’échelle de ses analyses. Parler du dĂ©rĂšglement du climat mondial et de chocs qui concernent de vastes aires gĂ©ographiques ne parle Ă  personne. Comment toucher notre quotidien pour que chacun se sente concernĂ© ?


C’est le pari des « GIEC rĂ©gionaux » qui essaiment un peu partout. Des groupements de scientifiques de tout poil rĂ©unis pour rendre lisibles les enjeux climatiques au plus proche des citoyens, et inspirer directement les dĂ©cideurs locaux. C’est une triple expĂ©rience de dialogue. D'abord entre les scientifiques eux-mĂȘmes, car en se rapprochant des enjeux il faut multiplier les regards et travailler dans une parfaite transdisciplinaritĂ©. C’est un dialogue avec le politique, qui n’est pas si courant pour nombre de chercheurs. Mais c’est aussi un dialogue avec les citoyens, puisque l’échelle rĂ©gionale permet d’aller sur le terrain pour expliquer, et aussi mieux comprendre les enjeux locaux dans toute leur complexitĂ©.


L’échelle locale permet de mieux toucher le caractĂšre systĂ©mique des problĂšmes Ă  venir. Elle permet aussi de donner aux analyses un caractĂšre situĂ© et concret, permettant d’accĂ©lĂ©rer le passage Ă  l’acte comme l’écrit HervĂ© Le Treut :


L’examen du fait climatique dans un contexte prĂ©cis est un vecteur d’actions et de rĂ©flexions qui peut mettre en prise directe les citoyens et les dĂ©cideurs autour d’enjeux qui ont une portĂ©e majeure.

Et si dĂ©sormais la planification de nos territoires et nos documents d'urbanisme passait avant tout par la comprĂ©hension de leurs vulnĂ©rabilitĂ©s ? Regarder le climat qui s'emballe depuis le territoire, c’est finalement chercher Ă  comprendre les fragilitĂ©s des systĂšmes naturels, Ă©conomiques et sociaux qui l’animent. Il est peut ĂȘtre temps de sortir des stratĂ©gies territoriales dopĂ©es Ă  la croissance infinie pour anticiper les bouleversements en cours et accepter de penser des futurs pleins d'incertitudes.


Les dĂ©cideurs qui doivent aujourd’hui comprendre nos vulnĂ©rabilitĂ©s et organiser la rĂ©silience de nos territoires sont moins loin qu’on ne le pense. Engager localement le dialogue entre scientifiques, politiques et citoyens autour de nos vulnĂ©rabilitĂ©s est exigeant et ne doit jamais se rĂ©sumer Ă  un coup de communication. Mais nous avons aussi besoin de penser local, pour agir local.


Ne manquez notre entretien avec le climatologue HervĂ© Le Treut, et de lire son ouvrage « Climat et civilisation, un dĂ©fi incontournable », un texte trĂšs Ă©clairant paru rĂ©cemment aux Ă©ditions Ères.


— Sylvain Grisot (Twitter / Linkedin)


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