Marseille, quatrième arrondissement, à deux pas du centre-ville. L’entrée est discrète et le quartier paisible. En se faufilant derrière une camionnette, on se glisse dans les interstices de la ville minérale pour découvrir un cœur d’îlot fleuri. Le cœur fondant d’un bonbon dur. Ça sent même le printemps précoce avec ce mélange de jaune des mimosas et de blanc des amandiers. Ça sent bon les travaux aussi, et ça s’affaire dans le jardin. D’énormes sacs de gravats se baladent dans l’allée, pendus aux fourches d’un chariot élévateur. Une charmante famille de poutres métalliques attend patiemment dans l’herbe le moment d’entrer en scène pour créer de l’espace et ouvrir des lumières. Et le sol est parcouru de tranchées qui grouillent de fourreaux multicolores.


Il se passe manifestement quelque chose par ici. Mais ce n’est pas une opération de densification de ce rare espace végétal dans une ville déjà trop minérale. Non, le panneau du permis de construire cloué sur la porte d’entrée a même été corrigé, avec le terme de « construction » barré vigoureusement, et remplacé par « réhabilitation ».


Pourtant l’histoire semblait écrite. Les lieux bénéficiaient bien de quelques protections, mais les propositions des opérateurs ne manquaient pas, misant sur un assouplissement des règles à l’usure, dans une ville où le code de l’urbanisme n’a parfois eu que des effets limités sur le réel. Mais entre la poignée d’occupants du LICA décidés à rester là, des propriétaires à l’écoute, des partenaires mobilisés et compétents et une politique locale qui vit son printemps, un projet alternatif émerge. Le jardin est préservé, les trois bâtiments — dont la bastide du 17e siècle — bénéficient d’une réhabilitation consciente et consciencieuse, et émerge « Le Tiers-Lab des Transitions », dédié aux transitions écologiques, numériques et sociales. On y retrouve un espace de coworking, des salles de réunion, un café, une cantine solaire, des espaces de fabrication numérique et artisanale, des potagers et un jardin partagé.


C’est un étonnant projet privé qui a trouvé son modèle pour éclore, et qui désormais va devoir faire ses preuves face au réel. Mais c’est surtout la démonstration que le cœur de nos villes n’est pas nécessairement condamné à une densification à outrance ou à l’immobilisme. Le chemin de traverse qui consiste à transformer sans dénaturer est étroit, mais il existe. Reste à comprendre comment tout cela est possible. Entre un projet lourd à porter, des besoins de financement conséquents, et l’absence de professionnels de l’aménagement dans l’équipe, rien n’était joué d’avance. Mais manifestement les alignements d’étoiles, ça se provoque à force de volonté, d’obstination, d’apprentissage et de ces savoir-faire si particuliers qui permettent de mettre autour de la table les bonnes fées.


Nous avons rendez-vous aujourd’hui avec une de ces aligneuses d’étoiles, Claire Demaison, qui nous raconte cette belle histoire. Bonne écoute.


- https://www.lica-europe.org/tiers-lab-des-transitions


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